A un moment où le mouvement sportif se mobilise contre une politique qui réduit ses moyens et met en danger le développement du sport pour tous, l’avis du CESE voté en juillet dernier et intitulé « L’accès du plus grand nombre à la pratique d’activités physiques et sportives » est particulièrement bienvenu : il fait des propositions qui, si elles étaient suivies d’effet, permettraient de donner une réalité à l’objectif affiché par le gouvernement d’augmenter de trois millions le nombre de pratiquants d’ici 2024, un objectif que les choix budgétaires actuels contredisent totalement.
Cet avis est la réponse à une saisine ministérielle dont le champ et le questionnement étaient limités, insistant fortement sur la question des équipements sportifs dans les territoires ruraux et « carencés ». Les rapporteurs, Muriel Hurtis et Françoise Sauvageot, ainsi que la section Éducation Culture et Communication et la section Développement Durable des Territoires qui ont élaboré l’avis, ont choisi heureusement d’aller au delà de ces limites et d’embrasser une problématique plus large.
Une première partie s’efforce de faire un panorama de ce qu’on sait des pratiques sportives : tout en soulignant le manque de données fiables et actualisées, le texte montre la diversité des pratiques et des attentes, leurs évolutions, et les sujets de préoccupation. On y trouve nombre d’informations et de données intéressantes mais aussi une analyse des inégalités existantes, des sources de blocage, par exemple les difficultés du sport au féminin, l’inadaptation de certains équipements et de leurs implantation ou les problèmes environnementaux qu’ils posent.
Les préconisations viennent ensuite après une introduction qui rappelle qu’une charte de l’Unesco met le sport au nombre des droits humains et affirme que c’est à l’aune de ce droit qu’il faut penser le développement des pratiques sportives et physiques. Si la proposition d’inscrire ce droit dans la Constitution, portée par Muriel Hurtis et soutenue par les représentants de la FSU, a rencontré l’opposition d’une partie des membres et n’a pu aboutir, ce rappel n’en est pas moins important.
Parmi ces préconisations on peut relever celle qui consiste à co construire des projets sportifs de territoire, associant les usagers aux décisions et aux choix, y compris en matière d’équipement. Et cette préconisation s’accompagne d’une autre, particulièrement d’actualité, concernant le financement « augmenter les plafonds de prélèvement sur les recettes de la Française des jeux, des paris sportifs en ligne et du produit des droits de retransmission télévisuelles, et créer une fondation Héritage Paris 2024. » .
Alors que le texte de la saisine ne portait pas sur le sport scolaire, un des chapitres des préconisations est consacré au développement de la pratique des APS « à l’école et dans l’enseignement supérieur »
Bien évidemment tout un volet est consacré aux équipement sportifs, à leur amélioration et à leur implantation, avec par exemple la proposition « d’intégrer, dans les opérations de rénovation urbaines et dans les projets d’envergure de construction de quartier d’habitations ou de bureaux ainsi que d’établissements scolaires, la construction et/ou la rénovation d’au moins un espace sportif et la desserte des équipements sportifs sur le territoire concerné » et de donner une priorité aux « territoires dépourvus au sein des QPV ( quartiers de la politique de la ville), des zones rurales et des Outre-mer, en veillant à leur moindre impact environnemental »
Mais parce que la construction ou la rénovation d’équipement ne suffit pas l’avis insiste sur la nécessité de penser leur adaptation aux usages et de veiller à l’accompagnement des usagers en renforçant la formation des encadrantes et encadrants sportifs pour adapter l’accompagnement des Activités Physiques et Sportives à des publics divers, par exemple en luttant contre les stéréotypes de genre, en féminisant l’encadrement sportif et « médiatisant le sport au féminin », et bien sûr en reconnaissant et favorisant l’engagement des bénévoles qui font vivre une multitude d’associations sportives. Cela ne va pas non plus sans reconnaître les rôles des fonctionnaires (CTS et CAS) du ministère des sports dont l’avis déplore la diminution incessante du nombre.
Les délais fixés par la commande gouvernementale et les limites imposées à la saisine n’ont pas permis d’aller toujours assez loin dans la réflexion et la discussion (par exemple les questions de la gouvernance n’ont pu être abordées) mais l’avis propose des analyses et des préconisations qui méritent qu’on s’y intéresse et qui tranchent avec la politique désastreuse contre laquelle s’insurge aujourd’hui le mouvement sportif.
Gérard Aschieri
pour en savoir plus et lire l’avis ; ici